Mon enfant

 

Mon enfant, je t’ai attendu dans la tristesse et l’incertitude ;
Dès lors ton prénom allait de soi : si triste j’étais en t’attendant.

 

Mon enfant, bel enfant : comme tu riais ; tu me faisais pardonner tout
Même la vie.
Tu ries toujours, moins sans doute ; plus avec moi ; ou si peu.


Ö ! Tu ne dis rien, mais je le vois bien.

Tu me reproches ton enfance difficile ;
Tu me reproches ton adolescence gâchée :
je ne t’ai pas fait de confitures ;
pas de crêpes à la Chant de l’heure ;
pas de goûters sous la tonnelle
avec les mères en chignon du quartier.

 

Seulement mes rages impuissantes ; les larmes non cachées ;
Les cachets pour oublier ;
Les après-midi devant la télé ;
Une BD par mois ; les habits pas repassés.
Les mêmes films passés en boucle.
Enfant calme ; enfant gentil ;
Enfant timide aux beaux yeux polis.

 

Les soirées où j’avais un peu trop bu ;
Les matinées où je partais dans les bois,
Pour courir, courir, avec mon chien mais sans toi
- Tu ne voulais pas courir.

Tu m’as reproché mes pâles tentatives d’amour ;
Tu me reproches mes blessures,
Et même de ne t’avoir rien caché ;
Qui sais : tu me reproches même de t’avoir aimé.


Tu te rappelles « L’été était pourri, pas de promenade,
pas de baignade…
mais nous on s’en fiche, on est tous les deux
Tous les deux contre tous, tout les deux contre le
temps, tous les deux avec un plat de pâtes.
Marrante, ma maman ; ma maman cinglée."

 

Mais tu ne veux pas de mes larmes, tu ne veux pas de mes joies.
Tu ne veux pas de moi. Comment t’en vouloir ?
.
Mais j’ai toujours été là pour toi, tu le sais.
Quand la guêpe t’a piqué, quand la fourmi rouge t’a mordu,
Quand tu as hurlé à cause de cette grosse araignée,
Quand le méchant t’a attaqué.

 

Tu me reproches peut-être de ne pas avoir été assez dure,
Tu me reproches aussi mon désordre qui est une excuse pour le tien.

Tu me reproches l’ombre que je jette sur toi, ma part d’ombre :
Qui n’a pas d’ombre ?


On croit que tout nous est dû parce qu’on est là simplement.
Je ne sais pas. Je ne sais rien.

Peut-être que je n’aurais jamais du être là ;
Peut-être que je n’aurais jamais dû vouloir de toi
Puisque tu ne veux pas de moi,
Hormis pour les « bons moments », la famille bêtifiante réunie autour de la table.
Je t’ai épargné ça tout de même.


La table que tu ne débarrasses pas -qui te l’a appris ?

Un coup d’épée dans l’eau
Échec et mat.


Mais toi, que vas-tu faire, mon enfant ?

____________

29 août 2010



07/10/2011
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