Emmenez-moi
Emmenez-moi voir le grand Khan
Les pagodes, les déserts blancs ;
Les minarets aux cieux abstraits
Brillant sur les glaciers parfaits.
J’ai parcouru toutes vos routes :
Goudron mouillé, fumant de doute
Pleure la brume aux gris matins
Chemins qui ne mènent à rien.
D’ici j’entends le corbeau freux
Battant les champs d’un vol affreux :
Noir et bleu, effrayant le soir
En cris puissants mais dérisoires.
Voudraient-ils donc voir le Grand Khan,
Ces oiseaux lourds jetés au vent ?
Ces oiseaux noirs à l’œil mauvais,
Ces armées que l’ hiver défait ?
Ils rêvent de voler très haut ;
D’être des aigles, des gerfauts,
Par dessus les monts très sauvages
Libres des mornes paysages.
On ne voit plus les sommets blancs ;
Les pagodes, les déserts blancs :
Les minarets sont en béton,
Le corbeau freux n’a plus de nom.
Mais dans mes rêves le grand Khan,
Rira toujours sauvagement :
Le corbeau vole avec les aigles.
Noir sur blanc, sans aucune règle.
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25 juin 2010